EXPOsed

22 janvier 2011 § 7 Commentaires

En introduction, feu la plus belle réussite architecturale de ces dernières années.

Je suis certe un peu rosse en matière d’architecture, mais je ne suis pas le seul à être de cet avis puisque le pavillon britannique a récemment reçu les honneurs qu’il mérite, à savoir le RIBA’s Lubetkin Prize dans la catégorie sobrement intitulée « Best building in the world ».

Dans un souci pédagogique sans cesse renouvelé, je prendrais la peine de renvoyer sur le site de son concepteur ceux à qui ce joyau n’aurait pas été introduit. Pour dire deux mots de cette bonne surprise de l’Exposition Universelle 2010 (actuellement en cours de démontage), il faut simplement savoir que cette oeuvre est en constituée de 60.000 fibres optiques de 7,5m de long dont chacune des extrémités intérieures renferment une graine des jardins botaniques royaux. D’où son surnom de « Seed-cathedral ». Je ne saurais à ce propos que trop vous inviter à visionner quelques prises de vue de l’espace intérieur si vous n’en avez encore rien vu. L’effet produit par la diffusion de la lumière naturelle à travers l’enveloppe du bâtiment est saisissant.

Vous aurez deviné que la photo n’est pas de moi… En voici une plus réaliste :

Wei, Jing Jing, Sheng et Shuo. Pour ceux qui se posaient la question, oui je travaille bien avec des chinois.

Comme ce poste concerne l’expo universelle, je n’aurais cette fois aucun scrupule à m’étendre en matière d’architecture… de même qu’en matière de société. Ayant entamé la visite par la rive gauche (Puxi), j’ai en premier lieu découvert la zone de l’expo réservée aux pavillons d’entreprises -chinoises, s’il fallait préciser-. Malgré un intérêt très relatif, l’ensemble représentait tout de même le tiers de la surface de l’expo. Il y aurait vraiment (vraiment) beaucoup de choses à dire sur le mercantilisme ambiant et l’importance donnée à l’argent ici. Comme ce n’est pas le sujet aujourd’hui, je me contenterais de dire que je n’ai pas tant ressenti ce communisme tant vanté comparé à l’omnipotence du modèle capitaliste. Le peuple chinois a (trop) bien appris sa leçon: entrecongratulons-nous peuples occidentaux, maintenant que nous avons bien pissé dans le pot, il va falloir manger la fleur…

Nous avons embrayé sur le « Pavillon de la ville du futur ». Autant m’avait-on dit que je rigolerais bien si j’avais l’occasion de visiter le pavillon nord-coréen, autant personne ne m’avait averti que j’aurais envie de pleurer en sortant de celui-ci. Paradoxalement, j’en viens presque à regretter de ne pas l’avoir visité plus tôt. J’étais déjà bien inspiré par l’actualité lors de l’écriture de mon mémoire il y a un an, mais après cette demi-journée à Disneyland n’en parlons pas… Difficile de décrire ce que j’y ai vu tant l’ensemble tenait plus d’un patchwork de projets médiatiques que d’une réflexion crédible. Comme toujours, l’économie de profit se renforce en récupérant tout ce qui lui passe sous le coude, et dans le cas présent un enjeu planétaire. Résultat, un tas d’idées merveilleusement sexy vantant des démarches toutes plus « durables » les unes que les autres (sans cohérence globale naturellement) pour un monde toujours meilleur. Typiquement le genre de démarche qui permet aujourd’hui de vendre n’importe quoi en architecture. D’ailleurs, l‘aliénation fonctionne à merveille si j’en crois les retours douloureusement recueilli après la visite. Ah, ce radieux avenir que je n’ai pas acheté mais qui m’est déjà vendu…

Dans la série des lendemains qui chantent (oui oui), j’ai récemment lu ceci :

« Le consommateur chinois est un adulte de 30-40ans avec le cerveau de maturité d’un enfant de 5 à 7 ans puisque en fait leur père ne conduisait pas de voiture ne les emmenait pas a l’école avec leur voiture, ils n’ont aucune idée des références de voiture, ils n’ont aucune idée des références de cosmétique, leur mère ne portait pas de cosmétique. On a donc un cerveau jeune malgré une capacité d’achat forte et un corps physique d’adulte et donc on a un bombardement de toutes les marques pour essayer de prendre cet esprit d’enfant et d’en faire le consommateur qui n’achète que votre marque »
La phrase est de M.Charles-Edouard BOUEE , extraite d’une interview disponible à l’adresse suivante.

C’est malheureusement plutôt le type de conclusions auxquelles j’étais moi-même arrivé. Le pire étant de l’avoir parallèlement entendu à plusieurs reprises de la bouche de français dont je vous laisse deviner l’activité… Je suis chaque jour un peu plus désolé de constater que ce bombardement passif semble être devenu le mode « d’apprentissage » actif d’une majorité de chinois. Résultat, ON vend n’importe quoi pour des sommes délirantes. Faute d’être en mesure d’apprécier par lui-même, le consommateur se base sur le prix (le plus élevé). Comment exprimer ses bonnes intentions à son client dans ces conditions?

Parenthèse close, revenons-en à la visite.

Certaines villes ou régions avaient aussi implanté leur vitrine dans ce secteur, égayant par moment une matinée qui commençait à devenir éprouvante…

À gauche, le pavillon de la ville de Madrid. Les initiés reconnaîtront FOA à Carabanchel.

À droite, le Shanghai Air Tree de l’agence espagnole Ecosistema Urbano, ou premier projet d’architecture Creative Commons.

Le pavillon de la ville de Ningbo, qui a très bien fait son travail puisqu’il m’a donné envie d’aller visiter cette ville à 3h de SH. Malheureusement, si j’en crois les dires d’un ami étudiant là-bas, il semble que je puisse me passer de ce détour. Bien dommage, surtout que je crois me rappeler qu’on y accède par le pont le plus long du monde (41km), récemment achevé.

Côté Pudong,

les pavillons nationaux connus et archi connus. Bien évidemment, nos amis hollandais étaient là… et chinois aussi. Du coup difficile de visiter beaucoup de pavillons :

– Ukraine : 5min (queue et visite comprises). À l’intérieur, 3 personnes. Deux qui chantent folklorique et une qui vend la version CD. À côté, une maquette et des perspectives 3D de projets immobiliers dont la qualité n’a pas été sans me rappeler ceux du pavillon de la ville du futur…

– France : Je n’avais clairement pas prévu de passer du temps à faire la queue pour visiter le sensuel pavillon français du non moins sensuel Jacques Ferrier… Mais comment dire non à des chinois fiers de le visiter avec un ressortissant français. Bref, plusieurs heures d’attente pour finalement parcourir une scéno paris-centrée ponctuées de ci de là par des corners Louis Vuitton et Sanofi (désolé Elo). Dans l’ensemble on ne peut pas dire que Ferrier n’ai pas rempli sa mission: la réalisation de l’ensemble était propre, et son principe scénographique empruntée au fantastique Guggenheim de Wright a une fois de plus fait ses preuves (offrant en outre à la masse une visite d’une fluidité bienvenue). Même si le bonhomme me fatigue et que son pavillon m’a ennuyé, je dois reconnaître que l’ensemble remplissait bien mieux son rôle que la majorité des pavillons. La preuve en est sa fréquentation record : 73 millions de visiteurs en 6 mois. Comme quoi, une fois de plus, l’architecture peut -et doit- être considérée de multiples façons…

– Luxembourg : attente relativement courte, sûrement OK, mais ne m’a pas laissé un souvenir suffisamment impérissable pour que j’ai quoique ce soit à en dire.

Bilan mitigé donc en ce qui me concerne, n’ayant pas pu visiter mon chouchou et ayant vu plus que je n’aurais voulu voir d’autres… Ceci dit, les moyens mis en oeuvre pour cet événement resterons longtemps dans les mémoires. Bien qu’il me soit de plus en plus difficile d’être surpris maintenant que je suis ici depuis quelques mois, ce n’est pas demain la veille qu’un pays en voie de développement égalera la performance chinoise…

Pour finir, de l’actualité toute fraîche : lu l’autre soir à cette adresse, le pavillon français aurait été offert à la ville et ne serait pas démonté..

§ 7 réponses à EXPOsed

  • PEF dit :

    Bilan mitige, bilan mitige… Bilan pourri j’ai l’impression! lol Ya pas beaucoup de positif la dedans dis donc!! mis a part cet oursin géant en ouverture contenant les parties génitale de la famille royale.

    On oublie la journee Disneyland a ton retour alors ?;)

    Fais nous donc un feed back sur HK!

    • Hugo dit :

      Non, mitigé, parce que c’est la seconde version de mon article et que j’ai justement fais l’effort d’atténuer ma critique :)
      Oui, on oublie disneyland (et le parc Asterix); en revanche je veux mon NPKB!
      Le feedback sur HK arrive bientôt (« juste » deux posts à finir avant..).

      ps: j’ai jamais mangé d’oursin.

  • jlc dit :

    bonjour H.
    merci pour cette visite commentée, je trouve que ta plume a encore pris de la densité et du style
    Je ne savais pas que le pavillon français avait eu un tel succès. Tu as raison, l’architecture peut fédérer
    Skype demain à 12 h pour ns ?
    biz

    • Hugo dit :

      Merci du compliment, même si j’ai encore des efforts à faire si je dois à mon tour écrire un livre comme mon père et grand-père l’ont fait :)
      Dur dur Skype en ce moment, je te reprécise dès que.. ça se précise!
      Mes hommages à Mère.

    • Hugo dit :

      Merci du compliment, même si j’ai encore des efforts à faire si je dois à mon tour écrire un livre comme mon père et grand-père l’ont fait :)
      Dur dur Skype en ce moment, je te reprécise dès que.. ça se précise!

  • andré dit :

    Densité et style, tout est dit! biz

Laisser un commentaire

Qu’est-ce que ceci ?

Vous lisez actuellement EXPOsed à Xǐ Nù Aī Lè.

Méta